Ce ne sont pas des tableaux mais des fragments, des pans de temps et d’espace, suspendus devant nous et qui nous invitent à la contemplation, à la méditation, à la concentration extrême. Il ne faut point y chercher un sens, un symbole ou un message. De l’art pauvre dans toute sa simplicité et sa splendeur. Du rien sur du quasi rien, un support à peine sensible mais un relief rigoureux et subtilement monochrome qui nous fait pénétrer dans le fourmillement de la matière, dans le substrat de la vie et du visible. Couleur crépusculaire ou rayonnement de l’aurore, rouge du soir ou halo de l’ébloui, l’œuvre de Navez donne à voir le tout à partir de l’élémentaire. C’est à partir du minimum, travaillé avec une profonde patience et un souci de la justesse dans le rendu que l’artiste nous aide à atteindre la plénitude. C’est-à-dire le plein esprit plongé dans l’univers, le milieu immense qui nous entoure et nous contient, nous donne à penser et à rêver. Un éclat de ciment pigmenté, une écorce de terre, une onde de clarté suffisent à notre œil pour recréer un monde, instaurer un contexte riche et complexe, faire surgir une émotion inconnue et fertile. En ne montrant que la matière et les mille nuances qu’elle recèle, les vibrations qu’elle envoie, le peintre nous permet le détachement salutaire, l’ouverture vers l’ailleurs ou le lieu inexploré du dedans, la voie vers l’illimité, l’harmonie et la sérénité que cherche si humblement le méditant. En nous servant de ces ardoises de présence qu’a disposées l’artiste autour de nous, nous couvrirons le toit de notre temple intérieur de précieux moments de solitude et de partage. Seuls à sentir la grâce incomparable de ces instants éphémères et ravis en même temps d’être au coeur de ces regards fervents qui cherchent l’étincelle, le grain éternel de la lumière…
Michel Ducobu
Juin 2014
Parmi les fonctions de l’art, celles de la trace, du signe, de l’arrêt, sont de tous les temps. André Navez s’y attache.
Il sème les matières dont il observe les créations. Il les encourage, les stimule par la lumière, le geste ou le contraste. Il y a bien là une scénographie de l’écart, de la distance du regard comme de l’émotion. On se prend à regarder plus loin, plus avant, plus profond comme si l’œuvre refusait de se dévoiler, de nous livrer son histoire.
Et cette résistance nous dynamise, nous pousse à heurter davantage encore la matière, support du sens.
Michel Franceus
Echevin des Affaires Culturelles – Mouscron
Toucher du regard
André Novez est peintre du sensible, ses textures sont prétexte à la couleur et inversement. Entre pigments et matière les devenirs s’échangent et se répandent L’artiste nous invite à une vision tactile, à toucher du regard, à caresser une chair abstraite.
Parfais, André Novez utilise des oxydes pour finaliser la surface pigmentée, à d’autres moments sa gestuelle seule opère.
Evoquer la technique des oxydes renvoie à la maturation de l’œuvre, en quai elle advient en partie selon ses propres règles, son propre temps
Nombreuses toiles évoquent l’altération d’un monochrome premier, une sorte de jeu du temps sur une surface originelle dont la mémoire se marque L’eau bj agit comme un révélateur, comme un fluide mirifique
André Novez vit au rythme de ces œuvres dans son atelier laboratoire
il est comme l’accompagnateur de la vie de ces chairs minérales Il ensemence des champs de couleurs avec d’infimes poussières, observe des dégradés et des courants, crée des revers et des surfaces, joue de l’altérité.
Veloutés de matière, pièges à lumière, vibrations… l’œuvre est contemplative, elle arrête le regard et s’y ouvre en son aspect fractal, sans limites. Rien ne peut mesurer la texture, l’infinité de la matière vibrant dans la lumière, accrochant les photons.
Jean-Philippe Goffaux